« Tu me vois. Tu ne me vois plus. » - Zora

Fermant les yeux, la jeune femme fut obligée de s'arrêter dans sa course. La personne qu'elle voulait tant éviter venait de se mettre juste devant elle. « Eléna.. » Visiblement pour la discrétion c'était raté. Malgré sa teinture blonde, son visage n'avait pas changé – malheureusement – et on arrivait encore trop souvent à la reconnaître contre son gré. Ouvrant grand ses yeux en tant que bonne comédienne, elle fit semblant de ne pas comprendre la situation comme si – en fait – elle ne s'appelait pas du tout Eléna. Quelle merde, de toute évidence, Zora l'avait reconnue et elle n'en doutait pas une seule seconde. Passant sa langue nerveusement sous ses dents de devant, elle grimaça un peu. « C'est Zora. » Sans blague, bien sur qu'elle savait que c'était elle. De toute façon, contrairement à la journaliste, la maquilleuse n'avait pas du tout changé. Elle était toujours aussi jolie, toujours aussi blonde.

Serrant les dents, son regard fixait le sol dans l'impossibilité de faire face à ses yeux bleus. « Je sais.. » commença t'elle par dire avant de se mordre le bas de la lèvre supérieur. Prenant finalement son courage à deux mains, son regard se remonta jusqu'à ce qu'elle se perde un instant dans ses yeux. Tous leurs souvenirs remontaient dans sa tête mais elle ne devait pas y penser. Non, elle n'avait plus le droit de repenser à tout cela. « Mais.. Eléna existe plus Zora, elle est morte et t'aurais déjà du l'oublier » cracha t'elle – presque méchamment - en passant une main dans ses cheveux blonds. Ce qu'elle disait, elle le pensait sincèrement, quelque part son ancienne personnalité était morte tellement elle était enfouit à l'intérieur de son corps. Et en aucun cas elle avait envie que Zora se rende compte du monstre qu'elle était devenue. Il valait donc mieux qu'elle imagine que son amie était morte et enterrée, ainsi la douleur serait probablement moins forte. Fixant intensément ses yeux couleur océan, elle soupira bruyamment puis contourna le corps de la maquilleuse pour fuir à nouveau.

Jamais Eléna n'aurait pu oublier cette petite tête blonde. Après tout ce qu'elles avaient partagé ensemble qu'il s'agisse de joie ou de peine, elle l'avait toujours considéré plus ou moins comme une sœur et devoir lui demander qu'elle l'oubli était un véritable déchirement. Mais ne dit-on pas que si l'on aime une personne, on doit la laisser être heureuse même sans vous ? Et bien c'était ce que la jeune femme pensait. Être odieuse avec son amie était tout bonnement impensable et c'est pour cela qu'elle préférait complètement couper les ponts avec elle. Finalement, elle n'aurait peut être pas du choisir Berlin comme destination. Au moins, au fin fond de la France, elle ne risquait pas de revoir des personnes qui lui étaient chères.

Commençant à s'enfuir – comme à chaque fois – elle ne pu pas faire trois pas avant d'être rattrapée par le bras. Mordillant sa lèvre inférieur, il lâcha un souffle avant de se retourner pour faire à nouveau face à la jolie blonde. Dégageant son bras du sien, c'était une chose qui faisait partit de sa nouvelle personnalité. « Me touche pas ! » lança t'elle dans un semblant d'énervement. Plus personne n'avait le droit de poser la main sur elle, de la toucher lorsqu'elle n'en avait pas envie. Enfin, il y avait toujours cet homme qui la touchait contre son gré. Soit. Aujourd'hui elle ne devait pas penser à lui. Ses yeux bleus étaient perçants et troublaient largement la journaliste qui se maudissait d'avoir eu envie de sortir en cette belle après midi. « Qu'est qui se passe Eléna? Pou..pourquoi tu dis qu'elle est morte.. je.. je comprends pas. » Cherchant ses mots, ce ne fut qu'après un long moment de silence que l'ancienne brune rouvrit sa bouche. « Ya rien. Ya rien à comprendre Zora. J'suis plus la même et t'as plus rien à faire avec moi. » dit-elle sèchement à contre cœur. Si elle devait se faire méchante et blessante pour que son ancienne amie comprenne que c'était dangereux de rester vers elle, alors en aucun cas elle hésiterait. Le regard noir et agressif, elle la fixait simplement sans un mot, juste pour lui faire comprendre qu'elle ne plaisantait pas. « J'suis désolée mais c'est mieux comme ça » conclu t'elle avec une pointe de tristesse malgré tout dans la voix.

La déception et la tristesse que ressentait Zora en ce moment même se lisait dans ses yeux à la couleur de l'océan. Cela faisait d'autant plus mal à Eléna qui savait pertinemment que c'était ses mots qui étaient la cause de son état. Elle faisait ça pour la rendre heureuse mais là, elle venait de la faire souffrir alors est ce que c'était finalement mieux joué ? Probablement que non. Néanmoins, la journaliste ne bougea pas d'un poil, elle resta là, plantée comme une idiote à ne pas savoir quoi dire, quoi faire. Son sourcil s'éleva lorsque son ancienne amie se mit à fouiller dans son sac. Que faisait-elle ? Se demanda la blonde en levant un peu son visage pour voir ce qui se tramait. Qu'écrivait-elle sur ce bout de papier ?

« Si tu change d'avis tu sera où me trouver.. » Qu'est ce que ça voulait dire ? La jeune femme fronçait ses sourcils à nouveau en prenant le bout de papier. Très vite, ses yeux balayèrent le bout de papier et elle se rendit compte qu'il s'agissait de ses coordonnés. Lorsqu'elle releva son visage, Zora avait déjà fais demi tour et elle s'en allait visiblement blessée par tous ses propos méchants. « Merde tiens. » lança t'elle pour elle même avant de former une boule avec le morceau de papier que lui avait donné la maquilleuse. Ouvrant sa main, la boule de papier atterrit au sol et elle shoota dedans avec le bout de sa chaussure. « Fais chier. » souffla t'elle avant de se pencher pour récupérer le bout de papier entre ses mains. Sortant son téléphone portable, elle composa le numéro que son amie venait juste d'écrire. Cela faisait seulement quelques minutes qu'elles s'étaient séparées, Zora ne devait donc pas être bien loin. Lorsque cette dernière décrocha, la jeune femme s'empressa de parler « T'es où ?.. j'suis désolée, j'devrais pas m'en prendre à toi comme ça. »

Au téléphone avec une des personnes les plus importantes pour Eléna, la jeune femme fit quelques pas dans la direction que Zora avait prise. Elle ne pouvait pas la laisser partir comme ça, sans explications. Lui faire du mal comme elle venait tout juste de le faire était tout simplement impardonnable mais la journaliste tenait quand même à s'excuser. Il faut savoir que si ça avait été une personne autre que Zora, l'ancienne brune n'en aurait eu que faire du numéro de téléphone. Hors là, c'était son amie. Celle qui l'avait toujours aidé dans les moments difficiles, la personne avec qui elle avait partagé des tas de choses.. « Je suis la rue plus loin.. » A la suite de ces mots, Eléna accéléra son mouvements de jambes pour presque se mettre à courir. Elle s'arrêta au début d'une nouvelle rue en voyant que son amie l'attendait au milieu du trottoir.

Reprenant un pas plus lent, elle se dirigea doucement vers elle en l'écoutant. « Oui j'ai rien fais, je mérité pas ça Eléna!! J'étais contente de te voir et toi ce que tu me trouve à me faire, c'est de limite m'agresser car j'ai eu le malheur de te reconnaître après plusieurs années d'absences. Pourquoi.. » Et c'était vrai, elle ne méritait pas ça. Devenue muette, la jolie blonde ne su quoi répondre à la maquilleuse. S'excuser, elle l'avait déjà fais, lui expliquer, elle ne se sentait pas encore prête. « J'ai le droit de savoir .. tu es mon amie même après le temps passer tu es toujours mon amie.. » Baissant son regard vers ses pieds, elle continuait de marcher de plus en plus lentement en restant toujours aussi silencieuse. Finalement, après quelques pas supplémentaire, elle redressa son visage et se retrouva une nouvelle fois face à Zora. L'expression du visage neutre, vide, elle raccrocha en la regardant. « J'voulais juste te protéger » souffla t'elle le regard pétillant. « Tu es la seule qui compte vraiment pour moi..tu sais. » dit-elle d'une voix bien plus douce que précédemment en glissant son portable dans sa poche. Depuis son départ à Londres, la jeune femme n'avait plus un seul amis et depuis qu'elle était jeune elle n'avait plus de famille. Et parmi ses anciens amis, Zora était celle qui primait devant les autres.

Regardant quelques secondes les commerces qui se trouvaient autour d'elles, la jeune femme ne savait pas si le fait d'avoir rappelé Zora était une bonne idée. Et si on lui faisait du mal aussi à son amie ? Et si elle aussi lui faisait du mal avec son caractère changeant ? L'ancienne brune ne pouvait de toute façon pas revenir en arrière et puisqu'elle avait décidé de la rappeler maintenant elle ne la laisserait plus tomber. Reportant toute son attention sur la maquilleuse, Zora prit l'initiative de venir dans ses bras et Eléna ne la repoussa pas. Au contraire, elle se serra un peu plus contre elle en fermant les yeux pour profiter de ce moment si doux et agréable. « Tu compte toujours autant pour moi..grande sœur.. » Et bordel, si elle savait combien elle comptait aussi pour la blonde. Être partie sans rien dire avait été très difficile, devoir laisser les personnes qu'elle aime, c'était surement ce qu'il y avait de pire.

Appuyant sa main derrière sa nuque, elle fit en sorte que Zora pose sa tête sur son épaule. Tant d'émotion d'un seul coup ne pouvait pas se passer sans quelques larmes. Et ce fut une seule goutte salée qui descendit le long de sa joue. D'un geste rapide, elle effaça cette larme. Au moins, l'avantage c'est que son amie ne l'avait pas vu puisqu'elle était dans ses bras à ce moment là. Se reculant finalement, les yeux toujours aussi pétillant, elle lui adressa un demi sourire. « Tu m'as manqué » souffla t'elle en approchant doucement ses lèvres sur le front de la blonde. Elle s'éloigna ensuite d'un petit pas pour se remettre dans sa position initiale. « Ça te dis qu'on aille boire un verre ? »

« Tu m'as manqué .. » Ce manque avait donc été réciproque. Oh oui, elle lui avait terriblement manqué, c'était d'ailleurs la seule à qui elle avait pensé une fois loin de Berlin. Non pas qu'elle se fiche de ses autres amis mais dans un sens, si, ils n'avaient jamais été très importants pour elle. Personne ne la connaissait aussi bien que cette petite blonde juste là face à elle. Et ce visage, ce regard, ces yeux, cette expression, tout chez cette femme lui avait manqué. Ca avait été incroyablement dur pour elle de couper les ponts de cette manière. Se disant qu'elle ne pourrait plus avoir de ses nouvelles. Bien sur, parfois, la jeune femme tentait de savoir si elle allait bien par le biais d'internet, et surtout grâce au groupe Tokio Hotel parce que oui, les fans parlaient des fois de la maquilleuse.. Souvent en parlant assez mal d'elle d'ailleurs – ce qui rendait vraiment furax Eléna – mais bon, elle faisait des jalouses et forcément les mauvaises langues sont très souvent des filles jalouses.

Main dans la main – c'était une habitude – les deux jeunes femmes se dirigèrent donc vers le café le plus proche. Que les gens croient qu'elles étaient en couple n'était absolument pas un problème pour Eléna qui n'avait que faire du regard des autres. Lesbienne ? Et alors, de toute façon, elle n'était pas contre s'aventurer une fois avec une fille. Néanmoins, les expériences sexuelles étaient maintenant plus difficile pour l'ancienne brune. Depuis qu'elle s'était fais touchée, torturée de la sorte par cet homme, elle avait bien plus de mal à se laisser aller. Sauf si c'était elle – et seulement elle – qui l'avait décidé. « Depuis quand tu es à Berlin ? » La tête penchée, Eléna tentait de lire ce qu'il y avait écrit sur le carte des boissons. Ca aurait été bien plus pratique de la prendre entre ses mains plutôt qu'essayer de lire pencher mais ce n'était pas un problème, la jeune femme avait parfois des réactions incompréhensibles. « Ca fait quelques jours.. » répondit-elle en relevant son visage vers son amie. Le serveur arriva par la suite et la journaliste devança la jolie blonde face à elle « Un chocolat liégeois pour moi » Elle tourna ensuite son visage vers la maquilleuse pour qu'elle choisisse à son tour une boisson. Le serveur s'échappa ensuite et Eléna se redressa pour croiser ses bras au dessus de la table. « Toujours maquilleuse de Bill ? » demanda t'elle en souriant.